Plus d’un milliard de personnes dans le monde vivent avec des troubles mentaux, selon de nouvelles données publiées mardi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Des pathologies telles que l’anxiété et la dépression pèsent lourdement sur les individus, les familles et les économies, alors que la plupart des pays échouent à fournir un soutien adéquat.
Les problèmes de santé mentale touchent toutes les sociétés et toutes les tranches d’âge. Ils restent la deuxième cause d’invalidité de longue durée et entraînent des coûts de santé accrus pour les familles comme pour les États, tout en coûtant environ 1 000 milliards de dollars par an à l’économie mondiale en perte de productivité, ont souligné les experts onusiens de la santé.
Un retard alarmant
Les conclusions figurent dans deux nouveaux rapports : « La santé mentale dans le monde aujourd’hui » et « Atlas de la santé mentale 2024 ».
Ensemble, ils montrent que, malgré quelques avancées depuis 2020, le monde reste très en retard face à l’ampleur de la crise. Ces rapports doivent alimenter les débats lors d’une réunion de haut niveau des Nations unies sur les maladies non transmissibles et la santé mentale, prévue à la fin du mois à New York.
« Transformer les services de santé mentale est l’un des défis les plus pressants de la santé publique », a déclaré le directeur général de l’OMS, le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus.
« Investir dans la santé mentale, c’est investir dans les personnes, les communautés et les économies : un investissement qu’aucun pays ne peut se permettre de négliger. Chaque dirigeant a la responsabilité d’agir de toute urgence et de faire en sorte que la santé mentale ne soit pas considérée comme un privilège, mais comme un droit fondamental. »
Des lacunes inquiétantes et des progrès inégaux
Les rapports mettent en évidence plusieurs constats marquants :
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Les femmes sont touchées de manière disproportionnée par les troubles mentaux, l’anxiété et la dépression étant les plus répandus pour les deux sexes.
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Le suicide a causé environ 727 000 décès en 2021 et reste l’une des principales causes de mortalité chez les jeunes. Au rythme actuel, le monde restera très loin de l’objectif fixé par l’ONU de réduire d’un tiers le nombre de suicides d’ici 2030, avec seulement une baisse de 12 %.
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Les dépenses publiques consacrées à la santé mentale représentent en moyenne 2 % des budgets de santé, un chiffre inchangé depuis 2017. Les pays à revenu élevé dépensent jusqu’à 65 dollars par habitant, contre seulement quatre centimes dans les pays à faible revenu.
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Le personnel de santé mentale est dramatiquement insuffisant dans de nombreuses régions, avec seulement 13 professionnels pour 100 000 habitants dans le monde.
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Moins d’un pays sur dix a pleinement adopté une prise en charge communautaire, la majorité continuant de s’appuyer largement sur les hôpitaux psychiatriques. Près de la moitié des hospitalisations sont involontaires et plus d’un patient sur cinq reste hospitalisé pendant plus d’un an.
Malgré ces difficultés, certains progrès sont à noter. De plus en plus de pays intègrent la santé mentale dans les soins de santé primaires et développent des programmes d’intervention précoce dans les écoles et les communautés.
Plus de 80 % des pays incluent désormais un soutien psychosocial et en santé mentale dans leur réponse aux urgences, contre moins de 40 % en 2020. Les services de télémédecine se développent également, même si l’accès reste inégal.
Un appel à une réforme systémique
L’OMS exhorte les gouvernements à accroître les investissements et à engager des réformes, avertissant que le rythme actuel est trop lent pour atteindre les objectifs mondiaux. Les priorités clés comprennent :
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un financement plus équitable des services de santé mentale,
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une meilleure protection juridique et des législations fondées sur les droits,
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un investissement accru dans le personnel de santé mentale,
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une transition accélérée vers des soins communautaires, centrés sur la personne.
L’agence onusienne de la santé insiste sur le fait que la santé mentale doit être considérée comme un droit humain fondamental. Sans action urgente, des millions de personnes continueront à souffrir sans soutien, tandis que les sociétés devront faire face à des coûts sociaux et économiques toujours plus lourds.
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