Communiqué de presse : Vers une nouvelle classe de médicament pour traiter le diabète de type 2

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13 JUIL. 2022 – 14H00 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)

Véritable problème de santé publique, le diabète de type 2 touche des millions de personnes dans le monde. Développer de nouveaux médicaments, qui permettent de mieux traiter les causes sous-jacentes de la maladie, est donc une priorité de recherche. Dans une nouvelle étude coordonnée par le chercheur Inserm Vincent Marion au laboratoire de génétique médicale (Inserm/Université de Strasbourg), en collaboration avec l’Université de Birmingham (Royaume-Uni), l’Université de Monash (Australie) et avec Alexander Fleming, ancien directeur de la division Diabètes de l’agence américaine du médicament (FDA), les scientifiques ont conçu un nouveau produit appelé PATAS, dans une nouvelle classe thérapeutique d’antidiabétiques. Ce médicament possède la particularité de traiter l’origine même du diabète de type 2 et des comorbidités associées, notamment la résistance à l’insuline[1]. PATAS cible en effet de manière spécifique les adipocytes en y restaurant l’absorption du glucose et en rétablissant ainsi la physiologie métabolique du tissu adipeux[2]. Les équipes souhaitent mettre en place un essai clinique pour tester cette nouvelle piste thérapeutique. L’étude est publiée dans le journal Diabetes.

Le diabète est une maladie chronique qui touche 537 millions de personnes à travers le monde, la majorité d’entre elles étant concernée par un diabète de type 2. La prévalence de cette pathologie, caractérisée par des taux élevés de glucose dans le sang (voir encadré), est en augmentation ces dernières années du fait du vieillissement de la population mais également de la sédentarité et de mauvaises habitudes alimentaires. Le diabète de type 2 survient par ailleurs de plus en plus tôt.

 

A l’heure actuelle, tous les médicaments disponibles traitent les conséquences du diabète de type 2 en se focalisant principalement sur la régulation glycémique, mais ne ciblent pas le mécanisme biologique sous-jacent qui cause la maladie.

S’il serait donc nécessaire de développer de nouveaux de traitements plus efficaces, aucune innovation thérapeutique de rupture n’est arrivée sur le marché pendant plus d’une décennie.

 

C’est justement l’objet des travaux dirigés par le chercheur Inserm Vincent Marion et son équipe au laboratoire de génétique médicale (Inserm/Université de Strasbourg). Dans une récente étude réalisée en collaboration avec l’Université de Birmingham et l’Université de Monash, les scientifiques ont développé un produit appelé PATAS dans une nouvelle classe de médicaments antidiabétiques baptisée « Adipeutics » (pour ‘thérapeutiques ciblant spécifiquement l’adipocyte’).

Leur étude, menée à partir de modèles animaux, indique que cette nouvelle thérapie permet de restaurer spécifiquement l’absorption du glucose dans l’adipocyte malade ce qui a comme conséquence de traiter la résistance à l’insuline, avec des effets bénéfiques sur tout l’organisme.

 

Petit zoom sur le diabète de type 2

Le diabète correspond à un excès durable de la concentration de glucose dans le sang : on parle d’hyperglycémie.

Cette hyperglycémie provient d’une baisse de sensibilité des cellules – en particulier celles du foie, du muscle et du tissu adipeux – à l’insuline. On parle de « résistance à l’insuline ».

L’insuline est une hormone produite par le pancréas qui a pour rôle de faciliter la pénétration dans les cellules du glucose, leur principale source d’énergie. Pour répondre à la demande accrue en insuline qui découle de la résistance à cette hormone par les cellulesle pancréas en produit encore davantage… jusqu’à s’épuiser. La production d’insuline devient alors insuffisante et le glucose s’accumule irrémédiablement dans le sang.

 

Le rôle des adipocytes

Cette étude fait suite à de précédents travaux menés par l’équipe qui avaient identifié une nouvelle cible thérapeutique contre le diabète du type 2, en s’intéressant à une maladie monogénique ultra-rare, le syndrome d’Alström.

Les scientifiques avaient en effet mis en évidence que des anomalies du tissu adipeux[1] causées par la perte de fonction d’une protéine appelée ALMS1 entrainaient une résistance à l’insuline extrêmement sévère associée à un diabète de type 2 précoce chez les personnes atteintes du syndrome d’Alström. Par ailleurs, chez l’animal, restaurer la fonction de cette protéine uniquement dans les adipocytes rétablissait l’équilibre glycémique.

Pour aller plus loin, les équipes se sont intéressées de plus près à cette protéine ALMS1 et à la manière dont elle interagit avec d’autres protéines dans les adipocytes. Ils ont notamment montré qu’en absence d’insuline, la protéine ALMS1 se lie à une autre protéine appelée PKC alpha. A l’inverse, l’activation de l’insuline dans l’adipocyte induit une séparation de ces deux protéines, résultant dans l’absorption du glucose. Chez les personnes diabétiques, qui sont résistantes à l’insuline, ce lien entre les deux protéines est maintenu.

Fort de ces connaissances, les scientifiques ont développé le peptide PATAS qui permet de casser l’interaction entre ALMS1 et PKC alpha et ainsi de rétablir la signalisation de l’insuline dans l’adipocyte malade.

Dans des modèles de souris diabétiques, PATAS a été capable de rétablir la physiologie normale des adipocytes en restaurant l’absorption du glucose. « Grâce à PATAS, les adipocytes qui n’avaient plus accès au glucose sont à nouveau capables d’absorber le glucose pour ensuite le métaboliser afin de synthétiser et sécréter des lipides bénéfiques pour tout l’organisme tout en absorbant des lipides extrêmement toxiques, les acides gras non-estérifiés. Les effets sont visibles chez l’animal, avec une amélioration nette de la résistance à l’insuline, et de tout un tas d’autres paramètres et comorbidités, notamment une meilleure régulation glycémique, une diminution de la stéatose et de la fibrose du foie », explique Vincent Marion.

Ces résultats prometteurs chez l’animal permettent aux chercheurs et chercheuses d’envisager l’organisation prochaine d’un essai clinique afin de tester PATAS chez l’humain.

Afin de valoriser ces résultats et faciliter l’organisation d’un tel essai, Vincent Marion a par ailleurs fondé la startup AdipoPharma SAS.

[1] L’insuline est une hormone sécrétée par le pancréas. Elle favorise le stockage du glucose circulant dans les cellules musculaires, adipeuses et hépatiques et, d’autre part, inhibe la synthèse et le relargage de ce sucre à partir des réserves stockées. Chez les diabétiques, ces cellules répondent moins bien à l’insuline. On parle de résistance à l’insuline.

[2] Le tissu adipeux est un ensemble de cellules appelées adipocytes qui stockent des graisses.

image : Tissu adipeux viscéral de souris marqué en fluorescence avec de l’AdipoRed. Les noyaux sont colorés en bleu. © Vincent Marion.

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