Accra- Diana Adom*, âgée de 54 ans, a été diagnostiquée schizophrène il y a huit ans. Ce trouble mental a profondément perturbé sa vie jusqu’à ce qu’elle puisse enfin recevoir les soins nécessaires, notamment les médicaments qui l’ont mise sur la voie de la guérison.
« J’entendais des voix de personnes me dire des choses blessantes. Je suis devenue hostile, ce qui a engendré des changements dans ma manière d’interagir avec la société et a finalement conduit à la dissolution de mon mariage », se souvient Diana qui réside à Konongo, une ville de la région centrale d’Ashanti au Ghana. Vivant dans un environnement marqué par une stigmatisation généralisée et des abus de la part de sa famille et des membres de sa communauté, il était particulièrement douloureux de constater que ses deux enfants n’avaient pas été épargnés.
« Il m’était difficile de sortir de ma chambre parce que les gens m’insultaient. Ils se moquaient de mes enfants, les traitant ‘‘d’enfants de folle’’ », dit-elle.
Diana a commencé à consulter les services de santé mentale lorsque son état s’est aggravé. Elle a débuté le traitement immédiatement après avoir été diagnostiquée.
Elle est reconnaissante envers les professionnels de la santé mentale de l’hôpital public de Konongo Odumasi, situé dans sa ville natale, pour avoir contribué à transformer sa vie. Ceci grâce aux efforts soutenus du gouvernement qui visent à améliorer la prestation des services de santé mentale au Ghana.
Obed Amoakwah, le point focal du district pour la santé mentale, suit Diana pour des soins de longue durée. Il explique que bien que cela ait pris du temps pour établir une relation de confiance avec elle, la patiente se rend régulièrement au centre de santé pour prendre ses médicaments. Diana reçoit chaque mois des médicaments, parmi lesquels des antipsychotiques, ainsi qu’une thérapie psychosociale pour elle-même et pour sa famille.
Selon les estimations, au Ghana, plus de 2,4 millions de personnes vivent avec divers troubles mentaux puis 98 % d’entre elles n’ont toujours pas accès aux médicaments et à un personnel de santé qualifié. L’insuffisance des traitements et la stigmatisation associée à cet état de santé, conduisent souvent les personnes dans le cas de Diana à se tourner vers des guérisseurs spirituels ou à rejeter toute forme d’aide.
Dans le cadre de ses efforts visant à améliorer les soins de santé mentale, le gouvernement du Ghana a élaboré une politique nationale de santé mentale qui couvre la période 2019-2030. Cette politique a pour but de décentraliser les services de soins de santé mentale en les intégrant aux soins de santé primaires.
Grâce à une redevance dédiée à la santé mentale et au soutien des donateurs, l’objectif est d’offrir des services de santé mentale de qualité à toute personne dans le besoin, où qu’elle se trouve dans le pays, y compris aux personnes vulnérables ou à celles qui ne peuvent pas se permettre ces soins. La politique en question oriente également la formation et la réglementation des opérations des prestataires de services de santé mentale, ainsi que le fonctionnement des établissements correspondants.
« Nous continuons d’explorer toutes les possibilités afin d’améliorer notre système de services de santé mentale pour qu’il réponde pleinement aux besoins de nos patients », déclare Dre Amma Boadu, directrice adjointe de la santé mentale aux Services de santé du Ghana.
L’appui de l’Organisation mondiale de la Santé à ces efforts a été à la fois d’ordre technique et financier. En 2021, le Ghana a été sélectionné pour participer à l’Initiative spéciale pour la santé mentale du Directeur général de l’OMS. Cette initiative vise à soutenir la transformation du système de santé et à renforcer les services de santé mentale. C’est l’un des neuf pays dans le monde et le deuxième en Afrique à rejoindre l’Initiative spéciale pour la Santé mentale.
Au Ghana, ladite initiative vise à garantir l’accès à des soins de santé mentale intégrés, de qualité et centrés sur la personne, pour toucher 5,2 millions de personnes supplémentaires. D’ailleurs, elle contribue déjà à améliorer la politique de santé mentale dans le pays en instaurant un mécanisme de coordination entre les organisations de la société civile, les personnes vivant avec des problèmes de santé mentale, les organismes fournissant des services de santé mentale, ainsi que d’autres partenaires. Le Ghana renforce en outre la prestation de services de santé mentale de qualité au niveau des soins de santé primaires en formant des cliniciens à la détection, au diagnostic et au traitement précoce des troubles de santé mentale.
En partenariat avec le Département de la Santé et de la Protection sociale du Royaume-Uni, l’OMS a également apporté son soutien au Ghana pour améliorer les compétences en santé mentale et en soutien psychosocial de 394 travailleurs de santé. Cette initiative vise à renforcer les dispositifs d’accompagnement disponibles dans les écoles, dans les centres de santé et au sein des communautés.
« L’OMS se réjouit de collaborer avec le gouvernement pour fournir des services de santé mentale, concrétisant ainsi notre engagement mutuel à promouvoir la santé mentale en tant que droit humain universel », déclare le Dr Francis Kasolo, Représentant de l’OMS au Ghana.
Les mesures actuellement en vigueur s’inscrivent dans la continuité de l’Initiative pour le respect des droits à la qualité, lancée en 2019 et ce dans le but d’améliorer la qualité des soins et de promouvoir les droits des personnes vivant avec des troubles mentaux. Cette initiative comprend une formation virtuelle et en présentiel du personnel chargé des soins de santé mentale. Ainsi, les professionnels de la santé mentale seront mieux préparés à offrir des soins tout en respectant les droits et la dignité des patients.
Obed Amoakwah souligne que ces mesures ont contribué à une amélioration notable de la prestation de services pour près de 1,7 million de personnes souffrant de troubles mentaux. « Je pense que les formations que nous recevons, en particulier le cours en ligne sur le module QualityRights, ont renforcé la confiance que nous avons établie avec les patients comme Diana, les encourageant ainsi à revenir régulièrement dans nos cliniques », affirme-t-il.
*Nom d’emprunt.
Bureau régional de l’Organisation Mondiale de la Santé Afrique
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